Comment éviter le surendettement lors de l’achat d’un bien immobilier en indivision après un divorce

Comment éviter le surendettement lors de l'achat d'un bien immobilier en indivision après un divorce
Comment éviter le surendettement lors de l'achat d'un bien immobilier en indivision après un divorce

Achat d’un bien en indivision après un divorce : un projet qui peut vite basculer

Acquérir un bien immobilier en indivision après une séparation, c’est comme s’embarquer sur un radeau de fortune avec son ex : l’équilibre est précieux, parfois précaire, mais loin d’être impossible. C’est une démarche qui peut avoir du sens (notamment pour maintenir un logement stable pour les enfants), mais si elle est mal préparée, elle peut vous entraîner vers les sables mouvants du surendettement.

Alors, comment éviter de sombrer dans les dettes lorsqu’on décide d’acheter un logement à deux, après s’être quittés ? Dans cet article, je vous propose un éclairage clair, franc — mais jamais moralisateur — sur les bonnes pratiques à adopter pour éviter les pièges du surendettement dans ce contexte si particulier.

Comprendre ce qu’est l’indivision après divorce

L’indivision signifie que plusieurs personnes (en l’occurrence vous et votre ex-conjoint) sont propriétaires ensemble d’un bien, sans division matérielle. Chaque indivisaire possède une quote-part du bien, qui n’est pas matérialisée mais inscrite sur l’acte de vente (50/50 ou autrement selon les apports).

Après un divorce, l’achat en indivision peut être choisi pour :

  • Assurer un toit commun pour les enfants
  • Investir ensemble dans un bien sans poursuivre une vie conjugale
  • Garder une certaine continuité dans les habitudes familiales

Cela peut sembler pragmatique et apaisant. Mais attention : le système de l’indivision peut être une bombe à retardement financière si les règles du jeu ne sont pas clairement définies dès le départ.

Le vrai danger : le crédit immobilier partagé

La principale difficulté réside dans la solidarité du prêt immobilier contracté ensemble. Si vous empruntez tous les deux pour ce bien, alors vous êtes tous les deux conjointement et solidairement responsables du remboursement, peu importe ce que stipule votre accord personnel.

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Imaginons que votre ex-conjoint cesse de payer sa part ? La banque viendra se tourner vers vous. Oui, même si vous n’habitez plus ensemble ou que vous respectez votre part du contrat. C’est ce qu’on appelle la solidarité passive du co-emprunteur, encadrée par le Code de la consommation (articles L. 313-16 à L. 313-20).

Les clés pour éviter le surendettement dans cette configuration

Voici plusieurs leviers efficaces qui vous permettront d’assumer un achat en indivision tout en gardant votre liberté financière intacte :

Signer une convention d’indivision notariée

Trop rarement faite, cette convention est un document essentiel. Elle définit :

  • Les règles de gestion du bien
  • Les modalités de remboursement du prêt
  • Ce qu’il se passe si l’un souhaite vendre sa part

C’est votre filet de sécurité juridique. Un notaire pourra vous aider à rédiger un document clair et équitable, minimisant grandement les conflits futurs.

Établir une clause de solidarité encadrée

Lorsque vous contractez un crédit ensemble, évaluez la possibilité de limiter la solidarité dans le contrat de prêt. Certaines banques acceptent d’insérer des clauses spécifiques qui viennent encadrer juridiquement les responsabilités de chacun.

Plusieurs établissements permettent d’associer des assurances emprunteur différenciées, voire adaptées aux revenus de chacun. Cela peut éviter qu’un seul des deux se retrouve à tout payer si l’autre disparaît ou devient insolvable.

Prévoir une clause de rachat automatique en cas de changement de situation

Personne n’a de boule de cristal, certes, mais anticiper les aléas est crucial. Demandez à votre notaire d’inclure dans la convention d’indivision ou l’acte d’achat une clause de rachat systématique de la part de l’autre indivisaire en cas de désaccord ou de départ volontaire.

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Cette clause pourrait par exemple stipuler que si l’un veut sortir de l’indivision, l’autre a priorité pour racheter la quote-part selon une estimation impartiale.

Quelles alternatives à l’achat en indivision ?

Si le projet vous semble risqué, vous pouvez envisager des solutions plus adaptées :

  • Le démembrement de propriété : par exemple, un parent garde l’usufruit (le droit d’habiter) et les enfants sont nus-propriétaires.
  • La location conjointe : certes, cela ne constitue pas un investissement, mais permet de maintenir un chez-soi pour les enfants sans s’endetter lourdement.
  • L’achat par un seul des ex-conjoints, avec versement d’une indemnité d’occupation si l’autre loge dans le logement

L’analyse du projet, des capacités financières de chacun et des implications juridiques doit être au centre de votre décision. Vous vous éviterez bien des maux de tête.

Le rôle de la médiation et du conseil spécialisé

Avant de signer quoique ce soit ensemble, même sous l’effet de la bonne volonté post-divorce, il est primordial de consulter :

  • Un notaire pour les implications juridiques de l’indivision
  • Un courtier ou conseiller en financement pour sécuriser les aspects financiers
  • Un médiateur familial, qui peut aider à baliser les responsabilités de chacun dans la gestion quotidienne

Souvent, les difficultés ne viennent pas du projet immobilier lui-même, mais du manque d’anticipation, ou de communication bancale. Un œil extérieur, neutre, permet de débloquer bien des situations ou d’éviter de mauvais choix.

Le surendettement : un mécanisme légal mais complexe

Sachez enfin que le surendettement peut survenir sans que vous soyez négligent ou dépensier. Une baisse de revenus suite à une séparation, des frais imprévus pour les enfants, un prêt mal calibré… Autant de facteurs qui peuvent vous pousser à déposer un dossier auprès de la Commission de surendettement (gérée par la Banque de France, article L. 712-2 du Code de la consommation).

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Mais contrairement aux idées reçues, ce mécanisme n’est pas instantané, ni automatique. Il implique des démarches lourdes, un gel des dettes, potentiellement une inscription au fichier FICP (Fichier des Incidents de Crédit aux Particuliers), et une atteinte à votre capacité d’emprunter pendant plusieurs années. Le mieux est d’anticiper, et d’agir avant. Ne vous lancez jamais dans une acquisition si vous avez le moindre doute sur votre capacité à assumer seul(e) la charge du bien.

Ce qu’il faut retenir

Acheter un bien en indivision après un divorce peut être une solution intelligente, mais elle exige un savant mélange de préparation juridique, lucidité financière et communication. Le meilleur moyen d’éviter un surendettement est tout simplement d’évaluer honnêtement votre situation, de poser les bonnes questions (au lieu d’espérer simplement que “tout ira bien”), et de s’entourer des bons professionnels.

Et surtout, ne signez rien sous le coup de l’émotion ou “pour aller vite”. Dans ce genre de projet, la précipitation est parfois votre pire ennemie.

Je suis Caroline Parle, je conseille les particuliers sur le financement bancaire, et j’interviens dans le monde de la banque depuis 2008. Je suis rédactrice du site www.regroupez-vos-credits.fr depuis 2019.