Héritage immobilier avec crédits en cours : comment protéger sa famille du surendettement ?

Héritage immobilier avec crédits en cours : comment protéger sa famille du surendettement ?
Héritage immobilier avec crédits en cours : comment protéger sa famille du surendettement ?

Recevoir un appartement ou une maison en héritage, ça fait rêver… jusqu’au moment où l’on découvre qu’il y a aussi un crédit immobilier derrière, voire plusieurs. Et là, une question très concrète se pose : comment éviter que cet héritage ne se transforme en bombe à retardement pour votre famille et vos finances ?

Dans cet article, je vous explique, en langage simple, ce que prévoit la loi, quelles décisions prendre au bon moment, et surtout comment organiser vos crédits de votre vivant pour protéger vos proches du surendettement.

Hériter d’un bien avec crédits : ce que la loi prévoit

En France, quand une personne décède, son patrimoine est transmis à ses héritiers, mais pas seulement les biens : les dettes aussi suivent. C’est le principe posé par le Code civil : l’héritier reçoit l’actif et le passif de la succession.

Concrètement, si un bien immobilier est encore en cours de remboursement :

  • le crédit immobilier continue d’exister après le décès ;
  • les héritiers se retrouvent face à une question : accepter ou non la succession (et donc la dette) ;
  • l’assurance emprunteur peut, dans certains cas, rembourser tout ou partie du capital restant dû.

Le Code civil encadre tout cela, notamment via :

  • les articles 720 et suivants du Code civil (ouverture des successions, vocation à hériter) ;
  • les articles 768 et suivants du Code civil (droits et options de l’héritier : acceptation pure et simple, acceptation à concurrence de l’actif net, renonciation).

Ce qu’il faut surtout retenir : hériter ne veut pas dire automatiquement “prendre toutes les dettes”. Vous avez le choix. Et ce choix est capital pour éviter le surendettement familial.

Faut-il accepter ou refuser la succession ?

Au décès d’un proche, chaque héritier dispose de trois options prévues par le Code civil (notamment les articles 768, 770, 784 et suivants) :

  • Acceptation pure et simple : vous acceptez tout, biens et dettes. Si les dettes sont supérieures à l’actif, vous pouvez être amené à payer sur vos propres ressources.
  • Acceptation à concurrence de l’actif net (articles 787 et suivants du Code civil) : vous n’êtes responsable des dettes du défunt que dans la limite de la valeur des biens hérités. Autrement dit, votre patrimoine personnel est protégé.
  • Renonciation à la succession (articles 804 et suivants) : vous refusez purement et simplement d’hériter. Vous ne recevez aucun bien… mais aucune dette non plus.

Dans le cas d’un héritage immobilier avec crédits en cours, cette troisième voie – l’acceptation à concurrence de l’actif net – est souvent la plus protectrice si vous avez un doute sur l’ampleur de l’endettement ou sur la valeur réelle du bien.

Lire  comment gagner plus pour se desendetter

Quelques points de vigilance :

  • Vous avez en principe un délai de 4 mois pour exercer votre option (article 771 du Code civil). Passé ce délai, d’autres héritiers ou créanciers peuvent vous mettre en demeure de choisir.
  • Si vous ne répondez pas dans les 2 mois suivant la mise en demeure, vous pouvez être réputé acceptant pur et simple.
    Autrement dit : ne laissez jamais traîner le dossier de succession si des crédits sont en jeu.

Protéger sa famille en amont : organiser ses crédits

Le meilleur moyen de protéger vos proches du surendettement lié à un héritage immobilier endetté… c’est d’anticiper de votre vivant. Ce n’est pas très glamour, mais c’est terriblement efficace.

Voici les principaux leviers à connaître.

1. Bien choisir et ajuster son assurance emprunteur

Lorsqu’un crédit immobilier est souscrit, la banque exige presque toujours une assurance emprunteur avec des garanties décès (et souvent invalidité, incapacité). Si l’emprunteur décède :

  • l’assureur rembourse tout ou partie du capital restant dû, selon le niveau de couverture (100 %, 50/50 entre co-emprunteurs, 70/30, etc.) ;
  • le bien peut être transmis “net de dettes” ou avec un reste limité, beaucoup plus gérable pour les héritiers.

Si vous avez plusieurs crédits en cours (immobilier, prêt travaux, prêt conso), il peut être utile de :

  • vérifier vos contrats d’assurance (montants, exclusions, quotités) ;
  • augmenter la quotité assurée sur le principal emprunteur, si c’est lui qui porte l’essentiel des revenus du ménage ;
  • envisager une délégation d’assurance pour renforcer les garanties à coût maîtrisé.

2. Adapter la structure du crédit pour protéger le conjoint ou les enfants

Lorsqu’il y a deux co-emprunteurs :

  • un crédit avec une quotité 50/50 peut laisser une part de crédit à la charge du survivant ;
  • une quotité 100/100 (ou 70/30) protège davantage la famille, mais augmente le coût de l’assurance.

En parallèle, il est possible d’anticiper via :

  • une donation avec réserve d’usufruit ;
  • une SCI familiale bien structurée ;
  • un aménagement de régime matrimonial ou une donation au dernier vivant.

Ces montages ne font pas “disparaître” les crédits, mais ils permettent souvent de mieux organiser la propriété, la transmission et la charge de la dette.

Que faire si vous héritez déjà d’un bien endetté ?

Vous êtes déjà dans la situation : un proche est décédé, vous héritez (ou allez hériter) d’un bien avec un crédit en cours. Voici les principales étapes pour protéger votre famille.

1. Faire le point précis sur les dettes et l’assurance

  • Demander à la banque un décompte du capital restant dû ;
  • Consulter le contrat d’assurance emprunteur : montant de la couverture, prise en charge prévue en cas de décès, éventuelles exclusions ;
  • Vérifier également s’il existe d’autres prêts (prêt conso, découvert, prêt auto, etc.).
Lire  Comment éviter le surendettement lors de l'achat d'un bien immobilier en indivision après un divorce

Si l’assurance couvre 100 % du crédit, le bien pourra être transmis sans dette associée. Si la couverture est partielle, il peut rester un montant de crédit à rembourser : c’est là que les choix d’acceptation ou non de la succession prennent tout leur sens.

2. Évaluer la valeur réelle du bien

Demandez une estimation à un professionnel (notaire, agent immobilier). Comparez :

  • la valeur de marché du bien ;
  • le capital restant dû sur le ou les crédits ;
  • les éventuels autres actifs et dettes de la succession.

Si les dettes dépassent nettement les actifs, il peut être judicieux :

  • d’opter pour l’acceptation à concurrence de l’actif net, afin de limiter les risques sur votre patrimoine ;
  • voire de renoncer, si le patrimoine est clairement déficitaire.

3. Envisager la vente du bien pour solder le crédit

Accepter un bien immobilier endetté ne signifie pas que vous êtes obligé de le garder. Dans de nombreux cas, la meilleure protection contre le surendettement est… de vendre.

  • La vente permet de rembourser le capital restant dû ;
  • Le solde éventuel, une fois la banque payée, est partagé entre les héritiers ;
  • Si la vente ne couvre pas tout, l’acceptation à concurrence de l’actif net protège vos finances personnelles.

Attention : si vous avez accepté la succession “purement et simplement” et que vous gardez le bien avec un crédit lourd à rembourser, vous pouvez vous retrouver en difficulté de trésorerie, surtout si vos revenus ne suivent pas.

Anticiper le risque de surendettement : stratégies concrètes

Le surendettement, en droit français, est encadré par le Code de la consommation, notamment les articles L.711-1 et suivants (définition du surendettement, procédures de traitement par la Banque de France).

Pour éviter que vos héritiers ne se retrouvent à devoir passer par une commission de surendettement pour gérer votre “héritage de dettes”, plusieurs leviers peuvent être actionnés.

1. Regrouper vos crédits de votre vivant

Si vous avez déjà plusieurs crédits (immobilier, perso, conso), un regroupement de crédits peut :

  • réduire vos mensualités ;
  • simplifier votre situation (un seul prêt, un seul interlocuteur) ;
  • faciliter la compréhension et la gestion de la succession par vos proches ;
  • permettre d’ajuster l’assurance sur un seul contrat optimisé.

Un rachat de crédits peut aussi être l’occasion de :

  • revoir la répartition des quotités d’assurance entre co-emprunteurs ;
  • intégrer une logique de protection du conjoint ou des enfants ;
  • adapter la durée pour que le crédit ne court pas jusqu’à un âge très avancé.
Lire  méthodes de remboursement de dettes

2. Limiter l’effet “boule de neige” des crédits conso

Les héritages compliqués viennent souvent de situations où le défunt cumulait :

  • un crédit immobilier significatif ;
  • plusieurs crédits à la consommation (travaux, auto, carte de magasin, etc.) ;
  • un découvert chronique.

En réduisant ces dettes conso de votre vivant (remboursement anticipé, regroupement de crédits, arrêt des “petits” crédits renouvelables), vous diminuez mécaniquement le risque de laisser à vos proches une situation explosive.

3. Rédiger des dispositions claires avec un notaire

Un notaire peut vous aider à :

  • organiser la transmission de votre patrimoine immobilier ;
  • prévoir qui supportera quoi, dans la mesure du possible ;
  • anticiper les situations de veuvage, de recomposition familiale, etc.

Le droit des successions est dense, mais combiné avec une bonne gestion du crédit et de l’assurance, il permet de bâtir une vraie protection pour votre famille.

Quand et comment se faire accompagner ?

Que vous soyez en train :

  • d’organiser votre propre patrimoine pour protéger vos proches ;
  • ou de gérer un héritage avec des crédits en cours,

vous n’êtes pas obligé de tout affronter seul.

Selon les situations, il peut être utile de consulter :

  • un notaire : pour les aspects juridiques de la succession, les options (acceptation, renonciation, acceptation à concurrence de l’actif net), les montages patrimoniaux ;
  • un conseiller en financement / regroupement de crédits : pour analyser les crédits en cours, étudier un rachat, renégocier l’assurance, alléger les mensualités ;
  • un avocat, si la situation est conflictuelle entre héritiers ou avec la banque ;
  • la Banque de France, en dernier recours, si vous êtes déjà en situation de surendettement (procédure prévue aux articles L.711-1 et suivants du Code de la consommation).

L’important, dans ce type de dossier, est de ne pas laisser le temps jouer contre vous. Plus vous agissez tôt (pour choisir votre option successorale, renégocier les crédits, décider d’une éventuelle vente du bien), plus vous avez de marges de manœuvre pour éviter le surendettement.

Si vous avez des doutes sur votre situation ou celle de votre famille face à un bien immobilier avec crédits en cours, n’hésitez pas à demander un diagnostic global : niveau d’endettement, assurance, capacité de remboursement, solutions de regroupement ou de réorganisation. Une heure passée à faire le point peut éviter des années de difficultés.

Je suis Caroline Parle, je conseille les particuliers sur le financement bancaire et la gestion de leurs dettes, et j’interviens dans le monde de la banque depuis 2008. Je suis rédactrice du site www.regroupez-vos-credits.fr depuis 2019.